22.10.08

EL AAIUN APRES 33 ANS

par Mohamed Mahamud Embarec

[trad. al espaňol]

Mars 2008. Après 33 ans d'exile, je décide de faire un voyage pour revoir ma vieille mère. En absence de vol direct, nous devons faire escale à Agadir. La route entre Agadir, Goulimim, Tan-Tan est parsemée de postes de contrôle de la police et la gendarmerie.

Tant-Tan resté derrière nous, nous apercevons la petite ville de Tarfaya dont le bâtiment le plus authentique reste la Casamar, abréviation de Casa del Mar (La Maison de la Mer) Cet ancien comptoir commercial installé en 1883 par les Britanniques, est complètement laissée à l’abandon dans le but d'effacer toute trace de présence espagnole dans la région.

Nous arrivons à Tah, frontière de l'ex-colonie espagnole du Sahara. La route est jalonnée de cabanes de pêcheurs juchées sur les falaises. Ils sont implantés le long de toute la côte sahraouie. Plus de 1100 kilomètres, infestés de personnes et d'embarcations artisanales. Depuis la construction du mur de défense, en 1984, les espèces maritimes sont victimes d'une grave usure à cause de la pêche arbitraire, la surexploitation et le non-respect des règles de conservation des espèces.

Nous arrivons au poste de "Chbeika". Nous sommes bombardés de questions : "Nom, prénom, nationalité, date et lieu de naissance, profession, lieu de résidence, carte d'identité marocaine, etc." Nul doute, le territoire fait l'objet d'une surveillance "privilégiée". Nous arrivons dans un endroit aux allures de région interdite. L'arrogance et le ton de l'officier qui pose les questions vous rappellent les risques de toute imprudence. Notre chauffeur, mon neveu en l'occurrence, fait que notre passage se fasse en douceur. Ma fille et moi, n'avons pas articulé un mot. La voiture redémarre et nous arrivons à la capitale sahraouie. Au nord de la rivière Saguia se trouve encore les bâtiments des anciennes garnisons de la Troisième Légion Espagnole, occupée actuellement par des effectifs des FAR marocaines. A la place de "Todo por la Patria", se trouve la devise "Dieu, Patrie, Roi".

El Aaiun a grandi à une vitesse effrénée grâce aux encouragements de l’État à travers les avantages fiscaux incitant les Marocains à s’y installer. La forte croissance démographique et la concentration de la population dans les villes ont conduit à l’émergence de bidonvilles. Habités par des sahraouis et des Marocains venus du Nord, entassés depuis des années dans des campements précaires créés par l'État pour regrouper de potentiels votants au référendum d'autodétermination. Le provisoire devenu éternel a fini par l'explosion de cette population contre ses conditions de vie.

Les Marocains regardent la population sahraouie avec indifférence, condescendance et mépris. Ils sont devenus de plus en plus influents dans le tissu économique, notamment dans le secteur le plus rémunérateur, celui de la pêche. Sous-qualifiés, diabolisés, souvent accusés de paresseux et politiquement inexprimés, les sahraouis ont assisté la rage au cœur à l'installation des marocains, lesquels les considèrent comme des citoyens de deuxième degré.

Les activités économiques sont limitées à la pratique de la pêche, l'extraction du phosphate et le petit commerce, ce qui offre très peu pour la création d'emplois. En 33 ans d'occupation, le Makhzen a été occupé plus à consolider sa présence qu'à créer des infrastructures sociales et économiques. La brochette de béni-oui-oui censée représenter la population sahraouie était occupée plus à s'enrichir qu'à défendre les intérêts de la population autochtone. Le développement a été freiné par les longues années de guerre acharnée, la faible industrialisation, les contraintes climatiques, l'éloignement par rapport aux grands centres d'affaires et, enfin, le poids de la corruption laissée par les longues décennies de "règne" de la dynastie Ould Errachid.

L'expansion urbanistique a laissé la partie basse, originelle et espagnole , de la ville à l’état de quartiers fantômes. Les "Zoco Nuevo" et "Zoco Viejo" sont devenus des ruines abandonnées. Le "Barrio Cementerio", appelé aujourd'hui Souk Jmal (le Marché des Chameaux) le Chicago de la prostitution, qui a connu un fort essor à cause de la forte présence des soldats et des garnisons militaires. Dans cette partie de la ville se trouve l'administration marocaine. L'immense villa de Khalihenna Ould Errachid, qui occupe tout un pâté de maisons, se trouve en plein centre-ville.

Nous traversons près du Parador, ancien hôtel espagnol, seul endroit encore gardé en son état originel et bien soigné. Devant sa porte, d'innombrables voitures Nissan Patrol, couleur blanche affichant les sigles des Nations Unies (UN). Des bérets bleus onusiens de la MINURSO se photographient entre eux. Les Chinois prennent la pose devant l'objectif des Equatoriens, et vice-versa. Des jeunes filles font le va-et-vient du Parador. Le besoin, l'encouragement de l'administration marocaine et l'argent facile pousse ces jeunes filles dans les bras des soldats onusiens. Ceux-ci, loin de chez eux, profitent de l'amabilité makhzénienne et de la beauté marocaine venue frapper à leur propre porte. Au soleil et loin des cauchemardesques missions de l'Afghanistan, le Darfour ou le Congo, ces soldats ont trouvé dans ce coin du désert le paradis rêvé. Les hôtels officiels se chargent de leur fournir le nécessaire en matière de femmes, bières, caravanes et promenades sur les chameaux et les dunes. Ils sont très loin de se plaindre de leur sort. La mission est tellement paisible au point de rester indifférents face à la répression exercée contre les jeunes sahraouis qui ont entamé un sit-in devant le siège de la Région, tout près de l'hôtel Nagjir où logent beaucoup de cadres de la MINURSO. Ceux qui parviennent à s'échapper gagnent l'hôpital Moulay-El-Hassan-Ben Mehdi, face au siège de la Minurso. Siège devenu complètement rouge à cause des drapeaux marocains qui l'entourent. C'est l'expression du défi marocain à l'instance onusienne. Défi face auquel, les officiers de la MINURSO n'ont trouvé que le silence comme réponse.

En remontant la falaise, nous retrouvons la partie où se trouvent les nouvelles constructions qui entourent les anciens quartiers espagnols de Colominas, Casa Piedra et l'aéroport. Ces vieux quartiers résidentiels ont disparu dans la densité des nouvelles constructions peuplées par les colons. Un peu plus loin à l'est, les bidonvilles et les quartiers Al Wahda, Erraha, etc. J'essaie de localiser ma maison. En vain. La densité est trop forte. Heureusement, mon neveu est là pour nous guider jusqu'à Hay Maatalla, d'où était partie, en mai 2005, l'Intifada de l'Indépendance. Des dizaines de membres de la famille nous attendent dans une tente installée à l'occasion de notre arrivée. En voyant cette foule entassée dans cette tente, une pensée est arrivée à mon esprit : l'acte le plus noble que la MINURSO pourrait accomplir c'est la destruction de ce mur marocain de défense pour permettre les retrouvailles des centaines de familles séparées depuis 33 ans.

Le lendemain de notre arrivée, un fonctionnaire de la police nous fait parvenir une convocation pour "établir un dossier de tout sahraoui qui se trouve à l'étranger". Trois heures au commissariat, des dizaines de questions et des visages qui reflètent la haine envers un peuple dont le seul crime est de se battre pour ses droits.
Véhicules de police, de l'armée, des soldats des forces auxiliaires dans tous les coins. Ma décision est prise : Plus jamais je ne remettrai les pieds dans cette ville, à moins qu'une solution au conflit soit trouvée. Les jours se font longs en attendant le retour à Bruxelles, un mois après. Ma vieille mère, elle, n'a pas pu savourer le goût des retrouvailles, sa mémoire a été effacée par la maladie d'Alzheimer.
22.10.08
Mohamed Mahamud Embarec, Bruxelles (Mahamud@skynet.be)
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EL AAIUN DESPUES DE 33 AŇOS

por Mohamed Mahamoud Embarec

Estamos en Marzo de 2008. Después de 33 aňos de exilio, decido hacer este viaje para ver a mi anciana madre. No hay vuelo directo hacia El Aaiún, por lo tanto tenemos que hacer escala en Agadir.

La ruta entre Agadir, Goulimim y Tan-Tan está sembrada de puestos de control de la policia y la gendarmeria. .

Detrás quedό Tan-Tan cuando vimos de lejos la ciudad de Tarfaya cuya construcciόn más antigua es Casamar. Este antiguo puesto comercial instalado por los británicos en 1883 esta completamento abandonado con el propόsito de borrar toda huella de la presencia espaňola en la regiόn.

Llegamos a Tah, frontera de la ex-colonia espaňola del Sáhara. El camino está bordeado de chozas de pescadores ubicadas en los acantilados. Se encuentran desplegados a lo largo de toda la costa del Sáhara Occidental. Más de 1.100 kilómetros infectadas de personas y embarcaciones artesanales. Desde la construcciόn del muro de defensa marroqui, en 1984, las especies marinas son víctimas de un grave desgaste a causa de la arbitrariedad de pesca, la sobreexplotaciόn y la infracciόn de las normas de conservación de la especie.

Una vez en el puesto de control de Chbeika, nos cae una lluvia de preguntas : "Nombre, apellidos, nacionalidad, fecha y lugar de nacimiento, profesiόn, lugar de residencia, carné de identidad marroqui, etc." No cabe duda, el territorio es objeto de una vigilancia "privilegiada". Estamos en un territorio que parece una region prohibida. La arrogancia y el tono del oficial de policía nos recuerda los riesgos de cualquier imprudencia. Nuestro conductor, mi sobrino, hace que pasemos suavemente. Mi hija y yo no articulamos palabra. El coche arranca y llegamos a la capital saharaui. Al norte del rio Saguia todavía se encuentran los antiguos cuarteles de la Tercera Legiόn Espaňola, hoy en día ocupados por los efectivos de las FAR marroquíes. En lugar de "Todo por la Patria", reza la divisa "Dios, Patria, Rey".

El Aaiún creciό de una manera desenfrenada animada por el Estado a través de ventajas fiscales que incitaban a los marroquíes a instalarse en la ciudad. El fuerte crecimiento demográfico y la concentraciόn de la poblaciόn en las ciudades dieron lugar a la emergencia de chabolas. Habitadas por saharauis y marroquíes llegados del norte, acumulados desde hace aňos en campamentos precarios cuya particularidad está en el hecho de haber sido creados por el Estado para ubicar a los votantes potenciales en el referendo de autodeterminaciόn. Lo provisional se ha vuelto eterno y terminό por la explosiόn de la ira de esta poblaciόn contra sus condiciones de vida.

Los marroquíes miran a la poblaciόn saharaui con indiferencia, condescendencia y desprecio. Se han vuelto cada vez más influyentes en el tejido econόmico, incluso en el sector más lucrativo, el de la pesca. Subcalificados, diabolizados, a menudo acusados de perezosos et sin expresiόn política, los saharauis asistieron, con la rabia en el corazόn, a la instalaciόn de los marroquíes, los cuales les consideran como ciudadanos de segundo grado.

Las actividades econόmicas están limitadas a la práctica de la pesca, la extracciόn de los fosfatos y el pequeňo comercio, lo que ofrece muy poco para la creaciόn de empleos. En 33 aňos de ocupaciόn, el Majzén estuvo más ocupado a consolidar su presencia que a crear infraestructuras sociales y econόmicas. La selecciόn "Beni-si-si" (que solo saben decir "si, si") que debía representar a la poblaciόn local estuvo más ocupada a enriquecerse que a defender los intereses de los saharauis.

El desarrollo fué frenado por la débil industrializaciόn, las dificultades climáticas, el alejamiento de los grandes centros de negocios y el peso de la corrupciόn heredada de los largos decenios de reino de la dinsatia Uld Rachid.

La expansiόn urbanística dejό a la parte baja, original y "espaňol", de la ciudad en estado de barrios fantasmas. Los "Zoco Nuevo" y "Zoco Viejo" se convirtieron en ruinas abandonadas. El "Barrio Cementerio", el Chicago de la prostituciόn, que está en su auge a causa de la fuerte presencia de soldados y de guarniciones militares. En esta parte de la ciudad, se encuentra la administraciόn marroqui. La inmensa villa de Jalihenna Uld Rachid, que ocupa toda una manzana de casas, se encuentra en pleno centro de la ciudad.

Pasamos cerca del Parador, antiguo hotel espaňol el único sitio todavía guardado en su estado original y bien cuidado. Delante de su puerta, numerosos coches Nissan Patrol, color blanco, con las siglas de las Naciones Unidas. Los boinas azules de la MINURSO se fotografían entre ellos. Los chinos toman posiciόn delante de los ecuatorianos y viceversa. Chicas jόvenes hacen el vaivén en el Parador. La necesidad, animadas por la administraciόn marroqui y el dinero fácil, estas jόvenes se arrojan entre los brazos de los soldados onusienses. Estos, lejos de casa, aprovechan la amabilidad del Majzen y la belleza marroqui que llega tocando a sus puertas. Bajo el sol y lejos de las misiones de pesadilla de Afganistán, Darfour o del Congo, estos soldados encontraron en este rincόn del desierto el paraiso soňado. Los hoteles oficiales se encargan de aprovisionarles de mujeres, cervezas, caravanas y paseos sobre camellos y dunas. Están lejos de quejarse de sus destinos. La misiόn es tan tranquila hasta el punto de volverse indiferentes ante la represiόn ejercida contra los jόvenes saharauis que organizaron un sit-in ante la sede de la Regiόn, cerca del hotel Nagjir donde residen varios cuadros de la MINURSO. Aquellos que consiguieron escaparse llegaron al hospital Moula El Hassan Ben Mehdi, justo frente a la sede de la MINURSO. Sede completamente enrojecida a causa de las banderas marroquíes que la rodean, como expresiόn del desafío marroqui a la instancia onusiense.desafío frente al cual los oficiales dela MINURSO sόlo encontraaron el silencio como respuesta.

Subiendo la cuesta, llegamos a la parte donde se encuentran las nuevas construcciones que rodean los antiguos barrios espaňoles de Colominas, Casa Piedra y el aeropuerto. Estos viejos barrios residenciales han desaparecido en la densidad de las nuevas construcciones pobladas por los colonos. Un poco más lejos, al este, los barrios de latas y Al Wahda, Erraha, etc. Intento localizar a mi casa. En vano. La densidad es muy fuerte. Afortunadamente, mi sobrino nos guía hasta Hay Maatalla de donde partiό, en mai 2005, la Intifada de la Independencia. Decenas de miembros de la familia nos esperan en una tienda instalada con motivo de nuestra llegada. Viendo esta muchedumbre acumulada en esta tienda, me dije a mi mismo que quizá el acto más noble que la MINURSO podría llevar a cabo sería la destrucciόn del muro de defensa marroqui para permitir el encuentro de centenas de familias separadas desde hace 33 aňos.

Al día siguiente de nuestra llegada, un funcionario de la policía nos hace llegar una convocaciόn de la policía "para hacer un expediente de todo saharaui residente en el extranjero". Tres horas en la comisaría, decenas de preguntas y rostros que reflejan el odio hacia un pueblo cuyo único crimen es el de combatir por sus derechos.

Vehículos de la policía, del ejército, soldados de las fuerzas auxialiares en todos los rincones. Ya lo tengo decidido : ya unca más volveré a pisar este suelo, a menos que una soluciόn sea hayada para este conflicto. Los días se hacen largos en espera de retornar a Bruselas, un més después. Mi anciana madre no pudo saborear el gusto de nuestro encuentro, su memoria ha sido borrada por la enfermedad de Alzheimer.
22.10.08
Mohamed Mahamud Embarec, Bruselas (Mahamud@skynet.be)
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